La vie des pionniers chinois en Mongolie aux prises avec un sol ingrat. 753
La vie des pionniers chinois en Mongolie aux
prises avec un sol ingrat.
(Etude économique.)
Par le R. P. Dr. R. Verbruoge, des Missions de Scheut.
(Suite.)
XIV o L’année agricole.
Après avoir fait connaître les cultures de la Mongolie et la manière de
travailler, nous pouvons aborder la description du cycle agricole. Voici, d’après
les observations de plusieurs années, les principales dates des opérations agri
coles. Nous comptons donner les variantes, d’année en année, dans nos publi
cations météréologiques; nous ne faisons ici que tirer quelques conclusions plus
générales, pouvant donner une idée des occupations de chaque mois, et nous y
ajoutons quelques-uns des principaux faits météréologiques afin de mieux faire
connaître ia vie champêtre.
Janvier. — C’est vraiment le mois de la morte-saison, pendant laquelle
il gèle continuellement et fortement, nuit et jour; le sol est dénudé comme une
aire à battre et les Chinois, sans travail aucun, restent le plus souvent calfeutrés
dans leurs maisons, ou s’occupent péniblement à recueillir du combustible,
raclant la surface du sol, ramassant de l’argol. — Il peut arriver que quelques
grands fermiers n’aient pas encore fini, au commencement de janvier, avec les
travaux sur l’aire; mais ce seront des malheureux retardataires, obligés de tra
vailler aux journées les plus brèves et de chômer aux nombreux mauvais jours.
C’est à cette époque qu’on fera le mieux aussi de vendre ce qui peut rester
de la paille ou du foin, car au printemps on risquerait de rester avec tout son
superflu pour compte. La fin de l’année chinoise arrive souvent en janvier
(d’autres fois début de février), et ce dernier mois de l’an est celui où il faut
régler les comptes de toute l’année. Tous les Chinois sont alors fort occupés à
recueillir les sommes nécessaires pour payer leurs dettes, en même temps qu’à
courir après leurs rentrées: car tous ont en même temps dettes et créances,
qu’ils portent allègrement pendant l’année, mais qui doivent se régler mainte
nant ou jamais. Problèmes souvent difficiles, épineux, tragiques. C’est aussi
le temps où les voleurs sont les plus nombreux, rôdant autour des villages,
pour faire un mauvais coup, voler une vache, dépouiller un voyageur. Il faut
alors redoubler de surveillance dans les fermes.
Février. — Souvent c’est au début de ce mois qu’on rencontre le mini
mum de température: en plusieurs années c’était au 4 février. Cependant les
journées deviennent belles; parfois la neige se fond au soleil, et des bandes
de pei-lirig-ze (alouettes de Mongolie) fendent l’air avec un bruit de soie froissée.
C’est donc dès le Li-tch’oun (ouverture du printemps chinois, 5 février) qu’on
voit les premiers signes d’un meilleur temps: les poules commencent à pondre;
mais c’est aussi la saison où les bronchites s’aggravent, notre mois de mars
européen.
A la fin du mois le beau temps se prononce de plus en plus. La neige
commence à diminuer, surtout dans les régions les plus méridionales, et alors,