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Dr. A. Métraux,
Etudes ¿’Ethnographie Toba-Pilaga
(Gran Chaco).
Par Dr. A. Métraux, Ethnologist of the Staff of the Bernice P. Bishop Museum, Honolulu.
(Fin.)
XI 0 Rites Funéraires.
Comme nous l’avons dit, la mort est toujours attribuée à la malveillance
d’un magicien ou au caprice d’un payak.
Les Toba pratiquent deux types d’ensevelissement: la crémation et l’in
humation. Ce dernier mode de sépulture tend à remplacer l’autre, probablement
sous l’influence des Blancs.
Le cadavre est brûlé le jour même du décès. Ceux qui élèvent le bûcher
et qui y transportent le mort ne doivent pas faire partie de la famille. On
choisit pour cette besogne une vieille femme et quelques hommes que l’on
paye. Ceux-ci vont chercher pour le bûcher du bois d’algarrobo et de tusca.
Pendant que le feu consume la dépouille mortuaire, la famille massée près
du bûcher fait entendre des gémissements et des pleurs. Sur les cendres on
jette de la terre; parfois on les recouvre d’une claie en jonc ou de branches
entrecroisées. La vieille reçoit un mouton pour sa peine, et avec ses assistants
va ensuite se purifier à la rivière. On dit même que ceux-ci sont obligés de
fermer les yeux, mais à quel moment de la cérémonie, je l’ignore. La famille
du mort est également tenue de se laver pour se débarrasser de toute mauvaise
influence.
Aujourd-hui, les morts sont généralement enterrés. Sans aucun doute,
l’influence des Blancs est pour beaucoup dans cet abandon des anciens usages.
Les Indiens le justifient néanmoins en disant que «quand un mort n’a pas
été aimé, on le brûle pour ne plus voir son visage. Ceux qui, par contre, ont
laissé derrière eux un bon souvenir sont enterrés avec leurs vêtements». Cepen
dant on ne met jamais de la nourriture dans la tombe. Toutefois il existe sur
ce point des opinions divergentes: certains prétendent que les morts enterrés
reviennent et que, si l’on ensevelissait ceux qui sont morts de la petite vérole, les
bêtes les déterreraient et répandraient l’infection. Seule la crémation pourrait
arrêter une épidémie.
Au cours de l’été 1933, les Toba-Pilagâ furent décimés par la petite
vérole. Certains chefs de fortins argentins, loin d’enrayer le mal, mettaient
dans leur abstention une malignité hypocrite et cruelle. La mort de ces êtres
inoffensifs et dignes d’un meilleur sort était pour ces militaires «un cadeau