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Full Text: Anthropos, 16/17.1921/22

Un totem Nigérien. 
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rivière, lac, grande forêt, d’autres fois on ne pourrait pas dire pourquoi. C’est 
comme cela; chose sacrée dans les pays (nsà aria) et tout est dit 1 . 
La défense et la qualité sacrée de certains objects peut même être levée 
par l’autorité religieuse. Le gouvernement anglais, en vue de faciliter l’ad 
ministration, a même une fois forcé la main à une espèce de pape noir, le 
roi sacré de Nri, en l’emmenant à rendre à l’usage profane toute une série 
de comestibles et d’actes humains qui dans le distinct d’Awka se trouvaient 
défendus. 
Il y a, en effet, des endroits plus riches, ou plus compliqués de tabous, 
que d’autres endroits à peine distancés de quelques kilomètres. A Nri, qui 
n’est pas pour rien une capitale religieuse (mère d’une population privilégiée, 
qui devait être reçue avec des cadeaux, partout où il lui plaisait de vaga 
bonder), le singe, le crocodile, le léopard, à peu près toutes les bêtes, sont 
associées aux privilèges et immurptés dont jouissent partout ailleurs les boas 
et les tortues. A Nimo, sur la colline opposée, la liste des tabous est allégée 
de nombre de ces aristocrates du règne animal, mais on y a inscrit les pigeons 
ramiers. 
Tabou d’abomination. 
Il y a, pourtant, des choses (pas seulement des animaux) qui sont partout 
et, si je puis ainsi dire, intrinsèquement tabous; pour ces choses-là la levée 
du nsà âna, essayée par le gouvernement européen, n’a pas pris, comme 
c’était à prévoir. La plus caractéristique de ces choses abominables et dé 
fendues, c’est l’existence de jumeaux humains. Partout, franchement ou en 
cachette (d’après la plus ou moins grande liberté que la distance de l’autorité 
européenne inspire aux noirs), les pauvres jumeaux sont impitoyablement 
liquidés, ordinairement jetés dans la brousse encore vivants, enfermés dans 
un pot en terre bouché d’une feuille de bananier. Les pères et mères chrétiens 
eux-mêmes, purgés de toute crainte superstitieuse de manger des rïsôs, se 
cachent à peine des païens pour goûter avec délice une friture de boa, trouvent 
souvent toutes les répugnances du monde à subir la honte et le malheur de 
nourrir des jumeaux dans la famille. 
1 Je ne crois pas qu’il y ait au monde des gens aussi peu soucieux du pourquoi 
que nos sympathiques Ibos. Après deux ou trois réponses d’une banalité déconcertante, ils 
finissent la question par un Amam («Je n’en sais rien») irrévocable. 
— Comment faisiez-vous du feu, avant la venue des blancs! 
— Nous frottions une allumette. 
— 11 n’y en avait pas. 
— Alors on allait chercher des charbons chez le voisin. 
— Amam ... ! 
On croit voir dans la circoncision, partout ailleurs, un rite profondément religieux. En 
beaucoup d’endroits elle se pratique, avec beaucoup d’apparat de mystère, à l’initiation de la 
puberté. Intffgué de voir chez les Ibos, si religieux en toute chose, qu’elle se pratiquait dans 
la semaine même de la naissance, sans aucune sorte de céré monie, j’ai souvent tâché de tirer 
d’un Ibo intelligent la raison de pratique: «Not to pass water crookedly!« (réponses de ces 
philosophes-là, sans rire, tout naturellement). 
Une seule fois j’ai entendu un Ibo faire de la théorie: — Quand la lune devient plus 
petite, il apparait plus d’étoiles au firmament. Quand il n’y a plus de lune, le ciel se remplit 
d’étoiles. Les étoiles sont donc de petits morceaux de la lune, qui s’est cassée en miettes! 
Ant.liropos XVI—XVII. 1921—1922. 
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